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.Les diacres eurent beau expliquer que les prémices de la crue avaient été mal interprétées et que la supérieure tirait avantage d'un fait naturel, personne ne les écouta.Pourquoi se priverait-on plus longtemps des pouvoirs d'une prêtresse dont les actes engendraient le bonheur ? Chez les chrétiens les plus fervents, on murmurait que l'évêque devrait se montrer moins intransigeant.L'ancienne religion ne vénérait-elle pas un dieu unique manifesté sous diverses formes et ne procurait-elle pas au christianisme le modèle de la Trinité ? Certains déterrèrent des statues enfouies dans leur cave ou près d'un cimetière, les replacèrent sur des autels domestiques et leur adressèrent des suppliques.Réapparut l'effigie de la déesse serpent, celle-qui-aime-le-silence, la protectrice des moissons.Sur la rive ouest, des moines que rendait furieux le prestige croissant de la supérieure tentèrent d'incendier les tombeaux intacts des explorateurs du grand Sud.Des pêcheurs les en empêchèrent et menacèrent de leur briser les reins à coups de rame.La tournure des événements ne surprenait pas l'évêque.Heureux de savoir la province à l'abri de la famine, satisfait de pouvoir reconstituer des réserves de nourriture, il tirait des leçons de sa défaite.Son amitié pour Sabni l'égarait et le détournait de sa mission sacrée ; son rôle de serviteur de Dieu consistait à imposer la vraie foi et non à écouter ses sentiments.Longtemps, en Orient comme en Occident, le culte d'Isis et d'Osiris s'était affirmé comme un redoutable rival du christianisme.En un siècle où l'Église croyait avoir arraché les racines du mal, il menaçait de renaître à l'endroit même où la grande déesse occupait son siège le plus vénérable et le plus prestigieux.Philae était ruinée, exsangue, à bout de forces, mais triomphait à cause d'un couple que les épreuves grandissaient.Sabni ne se convertirait pas ; demain, il prendrait la tête d'un courant religieux qui se doublerait vite d'un mouvement séditieux contre l'empereur.L'Égypte ne renoncerait ni à son génie ni à son indépendance ; elle croirait toujours que le temps n'est qu'illusion, le christianisme égarement passager et l'éternité de sa tradition la vraie connaissance.L'homme que Théodore aimait le plus au monde devenait son ennemi le plus dangereux.L'évêque n'avait pas le droit de se voiler la face : ce que Dieu exigeait de lui, il faudrait l'accomplir sans faiblesse.Alors que les eaux, au milieu du mois d'août, atteignaient leur point culminant, les vendanges débutèrent.Seize coudées : la hauteur parfaite de la crue suscita des louanges passionnées, décernées à Isis.Lors du conseil des notables, d'ordinaire empressés d'approuver les décisions de l'évêque, ceux-ci réclamèrent des mesures en faveur de la communauté : indemnisation pour les récoltes perdues, attribution de terres cultivables et d'une vigne, livraison de blocs de grès et de granite afin de réparer l'édifice.Un insolent osa même demander l'ouverture d'une enquête sur le supplice infligé trop hâtivement au spécialiste des onguents.Théodore repoussa l'ensemble de ces exigences avec fermeté.Ne s'estimant pas vaincus, ses interlocuteurs demandèrent audience au préfet.Maximin passait le plus clair de son temps à naviguer autour du temple afin d'apercevoir Isis lorsqu'elle montait au sommet du premier pylône ; lors d'une brève entrevue, il les écouta pourtant avec attention mais ne sut quelle position adopter.Favoriser Philae, c'était renforcer le pouvoir de Sabni ; lutter contre elle, mécontenter Isis et la perdre à jamais.Le préfet renvoya les notables devant le maître de la province.Le peuple grondait.Sabni, que ni la police ni l'armée n'interpellaient, savait lui parler.Sans invective, sans plainte, il se contentait d'évoquer les difficultés matérielles du temple.Pas une seule fois le nom de Théodore ne fut prononcé.Le supérieur ne réclamait qu'un peu de justice.Des femmes firent taire un diacre rappelant haut et fort que les païens étaient hors la loi.Bousculé, jeté à terre, il dut son salut à la fuite.Dès le lendemain, des bateaux apportèrent au temple pain, fruits, légumes et vin ; Isis remercia chacun des convoyeurs.De retour à Éléphantine, ils vantèrent sa beauté
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